A Place To Bury Strangers à Courtrai, au fabuleux pays où il n'y a aucune limite de volume légale dans les salles, du pain béni pour ces trois types là, bien décidés à nous faire fondre les tympans.
Déjà il faut noter l'ambiance soignée, comme toujours, dans la salle, à savoir toutes lumières éteintes, pas mal de fumée, un écran projetant des vidéos psychédéliques et deux vidéoprojecteurs placés de chaque côté de la scène qui projettent ces vidéos sur le public, ce qui donne, avec la fumée, des rayons des plus inquiétants. Bref ambiance parfaite.
Les New Yorkais débarquent sur scène, et tout de suite, c'est juste la guerre sur scène. Ackermann a empilé ses amplis comme un mur de baffles au fond de la scène et nous gratifie déjà de quelques sorties noisy qui nous coupent le souffle direct. Le nouveau bassiste est très différent de l'ancien qui restait souvent impassible à tout ce joyeux bordel, le nouveau lui, assure le show aussi de ce côté, et a un son encore plus monstrueux que son prédécesseur. Si l'on pouvait craindre le changement à ce niveau, dès le premier morceau on a été rassurés.
Le second morceau va entrer dans le vif du sujet directement et la pression ne retombera jamais tout au long du concert, Ackermann joue tellement fort que sincèrement, j'ai réellement cru que les haut-parleurs de ses baffles allaient s'enflammer, je vous jure c'est pas une figure de style, c'était vraiment comme ça. Impressionnant... le batteur a une frappe de bucheron, le bassiste quant à lui sue à grosses gouttes donnant des coups de pieds rageurs pour activer et désactiver ses effets. On est déjà sous le choc et on prend une claque. Et ça ne fait que commencer, le troisième titre, sur une intro martiale à la batterie nous fous un peu plus à genoux devant un groupe en train d'imploser sous nos yeux. Ackermann ne joue plus de guitare, il lutte littéralement avec son instrument, balançant de ses pédales magiques les sons les plus destructeurs qu'on ait jamais entendu, pendant que les deux autres vident à tour de rôle une bouteille de Jameson au goulot...
Assez vite dans le set viendra Ego Death... un des moments les plus intenses du concert, Ackermann, comme ça lui arrive quasi tous les soirs pratiquement, est pris dans son rite quasi autiste, se roulant par terre sous les hurlements des amplis, claquant sa gratte par terre, explosant les cordes, le tout dans un tonnerre sonique indescriptible. Expérience énorme... Pas déstabilisé pour un sou, les deux autres continuent de jouer pendant qu'il va prendre sa guitare de secours, et le concert reprend de plus belle balayant tous les tubes des deux albums, et quand même beaucoup du deuxième. In Your Heart, Lost Feeling, I live my life to stay in the shadow of your heart etc... tout y passera. A ce moment là le son est tellement fort qu'au premier rang où je me trouve, on peut sentir cette bonne vieille odeur de composants électroniques qui chauffent...
Il faut quand même saluer le travail excellent de leur ingé son qui avait l'air un peu bizarre quand on l'a vu avant, mais qui a mixé tout ça à merveille.
Vers la fin du concert, le groupe balance un "Ocean" qu'on attendait tous avec impatience. A nouveau c'est prodigieux, on ressent très bien toutes les émotions malsaines du groupe, et ce concert est vraiment plus physique qu'aucun autre. Le bassiste prend alors un des amplis fender de Ackermann puis le pose sur son épaule comme un ghettoblaster avant de le claquer par terre, la folie commence à prendre le pas sur la raison.
Dead Beat achève de nous mettre en transe, puis c'est le final du concert, chaque membre du groupe se laissant aller à des délires soniques tout en continuant d'assurer une rythmique. Ackermann maltraite sa guitare, la tenant par le jack et la faisant virevolter partout, les câbles s'emmêlent, les pieds de micros tombent, le niveau sonore atteint un niveau encore supérieur, c'est maintenant presque insoutenable, dans leur guérilla contre guitares et amplis qui prendront de sévères raclées, le bassiste prendra même un méchant coup au front et finira les dernières minutes la gueule en sang... De rage il claque sa basse à terre plusieurs fois. Cette fois c'est fini, le groupe quitte une scène où un ouragan semble être passé alors que le tonnerre des amplis gronde encore de toutes ses forces.
Pas de rappel, le set n'était qu'une grosse claque massive, une explosion, un rappel serait inutile, ils le savent et on le sait.
La salle se rallume et tout le monde semble encore sous le choc de ce qu'il vient de se passer.
C"était la troisième fois que je voyais A Place To Bury Strangers, et c'est de loin le meilleur concert auquel j'ai assisté, et peut être même, pour ma part, le concert de l'année.
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